Les Strauss-Kahn [Broché]

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Extrait
Le mariage

L'air est un peu frais, en ce mois de juillet 1992, et sur la terrasse d'où l'on aperçoit d'ordinaire, en surplomb, les frondaisons du bois de Boulogne, une tente a été dressée pour abriter les invités. La mariée a exigé de chacun la discrétion, afin de déjouer la curiosité des paparazzis qui la guettent et, dans ce petit milieu qui déjeune chaque jour aux mêmes tables en s'échangeant les bruits du Tout-Paris, chacun a exceptionnellement respecté la consigne et tenu le secret sur le lieu de la noce. C'est pourtant un remarquable tableau des moeurs parisiennes qu'offre, ce soir-là, le mariage d'Anne Sinclair et de Dominique Strauss-Kahn. Sur la terrasse de son appartement, avenue du Maréchal-Maunoury, la star incontestée du petit écran épouse un ministre en pleine ascension, et presque personne ne manque à cette union du pouvoir et de la gloire.
Quelques mois plus tôt, lorsque le couple est arrivé à la mairie du XVIe arrondissement pour la cérémonie civile, c'est d'abord sur elle que tous les regards se sont posés. Veste rouge à col de velours, jupe plissée noire, et ces fameux yeux bleus, les plus célèbres de France, qui envoûtent chaque dimanche des millions de téléspectateurs. Les fonctionnaires ont été pris de court par ce mariage dont les bans, sur dispense spéciale du procureur de la République, n'ont pas été publiés. Du marié, ont-ils seulement noté l'arrivée dans une voiture du ministère de l'Industrie, conduite par un chauffeur ?
Les magazines auraient donné très cher pour l'image de ces noces où l'on distingue, parmi les enfants de cette famille recomposée, les boucles de Lionel Jospin et les hautes silhouettes minces du couple Badinter. Un seul appareil photo a cependant été autorisé par Anne : celui de son amie intime, Micheline Pelletier. En historien et habile conteur, le mari de la photographe-reporter, Alain Decaux, a dû saisir la saveur du cliché : surplombant le maire en écharpe, le buste de Marianne a justement les traits de la mariée. C'est donc qu'elle est bien davantage qu'une vedette du petit écran, si elle inspire ainsi, entre Brigitte Bardot et Sophie Marceau, les sculpteurs de la République...
«La cérémonie aura lieu dans l'intimité», ont souligné Anne Sinclair et Dominique Strauss-Kahn en lançant les invitations. Suprême élégance que seule autorise l'extrême notoriété, ils n'ont souhaité aucune chronique mondaine, aucun écho dans les journaux. A la mairie, en novembre, seuls une vingtaine de proches étaient conviés. Pour la soirée offerte sur la terrasse de l'immeuble d'Anne, ils sont moins de cent. Mais il n'est pas besoin d'être grand clerc pour constater que deux visages sur trois, parmi ces privilégiés, sont connus. Des ministres, des intellectuels en vue, des journalistes amis et toutes les strates de la gauche confondues. Depuis Bernard Kouchner et Christine Ockrent, on n'a pas connu alliance plus spectaculaire.

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Revue de presse
Les auteurs évitent le double piège du livre à charge et de l'enquête